Pour un environnement sans GES anthropiques
Publié le 1 juin 2021
Ce texte fait partie d’une série de 15 articles qui visent à faire connaître le Plan des Chantiers de la DUC, élaboré par l’équipe de Group Mobilisation (GMob) dans le cadre de la “Déclaration citoyenne universelle d’urgence climatique”, qui a été reconnue par 525 municipalités représentant 80 % de la population québécoise.
Des Universitaires (6 de 15) – “L’aménagement du territoire est une affaire de municipalités, mais aussi de gouvernements.” Le mot clé, ici, est “affaire”, parce que c’est ce qui, trop souvent au Québec, a guidé cet aménagement : les intérêts privés de développeurs immobiliers prêts à n’importe quoi, pourvu que ça rapporte ! Les municipalités parfois s’y opposent, mais comme elles tirent principalement leurs revenus de la taxation foncière, certaines s’y réfugient, parfois avec la complicité du gouvernement, comme la MRC de Montcalm.
Ce même gouvernement du Québec a d’ailleurs annoncé récemment qu’il s’engageait à protéger 17 % de son territoire, un engagement que des vigiles citoyens se sont empressés de contester au plus haut lieu. Même la gestion gouvernementale des forêts ne semble pas exempte d’intérêts privés, et peut aller jusqu’à provoquer de la résistance sur le terrain. Chicanes sans importance ? “Des arbres, ça repousse, pis ce terrain-là, c’est juste une “swamp”, ça sert à rien !”
Une “swamp”, c’est un réservoir de carbone, qui agit comme un puits de carbone, éliminant du CO2 de l’atmosphère. Les océans, les sols et les forêts sont d’autres réservoirs et puits de carbone. Séquestré dans ces réservoirs, le carbone peut y résider très longtemps. Une tourbière stocke plus durablement le carbone qu’une plantation d’arbres ; mais si les deux brûlent, ils deviennent des sources de carbone (voir les définitions du GIEC). Conséquemment, le changement d’affectation des terres (forêts, marais, prés, etc.) influe sur le réchauffement planétaire
Compenser monétairement la destruction d’un milieu humide n’est évidemment pas une solution. En recréer un autre “pareil” non plus, car rien ne peut compenser la perte de ces milieux. On ne peut sérieusement prétendre “rehausser la force de la nature”.
Il tarde que nous prenions conscience que l’homme et son milieu ne font qu’un, et que les milieux naturels sont essentiels au cycle du carbone. Les décideurs et les décideuses doivent appréhender le risque que nos alliés naturels - les puits de carbone - se retrouvent comme bouées à la dérive, et qu’ils en viennent même à aggraver la situation.
Ce phénomène d’amplification des effets (rétroaction positive) peut malencontreusement conduire à des points de rupture. Ainsi, le réchauffement planétaire accroît le risque d’incendie, et les forêts, de puits de carbone qu’elles sont, deviendront avec le temps des sources de carbone. L’ère des mégafeux nous oblige déjà à des mesures hors-normes.
Plus inquiétant, selon plusieurs scientifiques, les points de bascule commencent à “s’accumuler” : i) affaiblissement du puits de carbone de la forêt amazonienne ; ii) diminution du rendement photosynthétique ; iii) plus d’une dizaine de points de bascule océaniques.
L’horizon s’obscurcit, et rend encore plus hasardeuses les mesures que nous pourrions prendre.
Saint-Exupéry avait peut-être plus raison qu’on ne le pense lorsqu’il écrivait “l’essentiel est invisible pour les yeux…” Respecter notre place dans la biodiversité, vivre sans nuire, nous en tenir à l’essentiel et voir l’invisible (la “swamp”) : cela serait déjà un bon début…
(Tiré de la Fiche C-DUC 5 du Plan de la DUC)
* Membres du regroupement Des Universitaires
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Marc Brullemans *, Ph.D. Biophysique, Membre du Collectif scientifique sur la question du gaz de schiste et les enjeux énergétiques au Québec
Jacques Benoit *, D.E.S.S. Développement économique communautaire